L’origine du monstre 

Je considère la matière comme dérivant de la conscience.  

Max Planck 


« Je vais vous raconter comment est né ce monstre. » 

Alma Vicdan leva les yeux en direction de la verrière de la bibliothèque, illuminée par les lueurs du crépuscule qui dansaient comme des paillettes à travers ses larmes. 

Quand il était arrivé à Espars, dans l’après-midi, les rues baignaient encore dans le jus bleuâtre où Sybil Vane, au milieu des silhouettes confuses, était apparue. Il l’avait suivie de loin, le long du boulevard Jean Ray, au pied de ses immenses murailles, croûtes noirâtres appliquées au couteau d’où jaillissait la lumière, aux étages supérieurs, dans l’enfilade des fenêtres qui montaient vers le ciel opalescent. Ces hautes baies vitrées ouvertes sur le vide avaient toujours attisé sa curiosité sans qu’il ne pût jamais en percer le secret, malgré les heures passées à étudier le tableau. 

Désormais au cœur de La ville et ses phanères, le chef-d’œuvre d’Estèphe Arkadas, il avait rendez-vous avec son créateur. L’égérie d’Arkadas, connue sous le pseudonyme de Sybil Vane, était une étudiante aux Beaux-Arts que le scandale lié à l’évasion du maître avait conduite au suicide dans les années 2000. Accusé du meurtre d’une jeune femme, le peintre purgeait une peine de prison lorsqu’il avait disparu à l’occasion d’une permission de sortie exceptionnelle pour le vernissage de sa dernière œuvre. Sybil Vane s’était détachée de l’amas informe d’une foule et voletait de porte en porte sur le boulevard, distribuant des cartons d’invitation pour une exposition fantôme. Il la regarda s’évanouir comme une promesse. Vicdan s’était arrêté devant le numéro 68. 

La veille, il avait été réveillé en pleine nuit par un appel du peintre fou, disparu depuis vingt ans. Il demandait à son exécuteur testamentaire et exégète de le rejoindre à Espars, la ville dont il avait peint les entrailles en prison. 

« Boulevard Jean Ray, n°68, un appartement au nom de R. U. Pickman. La porte sera ouverte. 

- Estèphe Arkadas ? 

- Après toutes ces années de bons et loyaux services, j’ai hâte de rencontrer mon biographe favori ! Je vous dois bien la vérité… 

- Où vous cachez-vous ? 

- La ville et ses phanères, vous savez où trouver mon tableau. Sybil Vane, qui m’a sacrifié sa vie, y apparaît lorsque la lune est gibbeuse au-dessus des toits d’Espars, dans une venelle obscure, à l’angle du Boulevard Jean Ray. Suivez-la du regard et laissez-vous faire. En aucun cas n’essayez de la rejoindre ou de lui parler, elle est morte, vous ne retrouveriez jamais le chemin du retour. » 


Tout en haut, à quinze mètres, touchant presque le plafond des immenses réserves du Centre Georges Pompidou, la lune gibbeuse était au rendez-vous, dans le ciel bleu cobalt d’Espars. 

« Je vous laisse M. Vicdan. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n’hésitez pas… 

- Merci à vous, Ewan, rétorqua-t-il en jetant un œil à son badge. Un long travail m’attend et j’aimerais ne pas être dérangé. » 

Il tira la chaise à trois mètres du tableau et se plongea dans l’observation des soubassements de la ville où s’agitaient des ombres. Il se frotta les yeux. Le visage du bibliothécaire, le petit cabinet où il l’avait suivi, les rayonnages de livres qui remplissaient l’espace, tout était flou comme à la surface d’une toile qu’un remords de peintre essuierait d’un chiffon imbibé de white-spirit. 

« Ces lueurs derrière la verrière, ne vous y trompez pas… Ce ne sont pas les derniers rayons du soleil, ce sont les flammes de l’incendie de la mansarde où le maître se terre. Elles illuminent notre ville dans l’espoir d’une fin mais la nuit finit toujours par les éteindre. Ma Très Petite Bibliothèque est le dernier refuge à cette folie. » 

La folie d’Arkadas ! Il en avait été témoin dans son appartement du 68 Boulevard J. Ray. Un esprit délirant, machiavélique et vide, prisonnier de ses propres fantasmes. Hors de lui, Vicdan avait tenté de l’étrangler. Les deux hommes s’étaient empoignés puis l’universitaire avait pris la fuite. 

Au crépuscule, après avoir exploré toutes les aspérités de la ville, il avait découvert la TPB et avait entrouvert la porte dans l’intention d’y demander ses livres pour les détruire. Surpris, le bibliothécaire l’avait poussé à l’intérieur et avait tiré derrière lui le rideau métallique. Il l’avait conduit, à travers l’immense escalier à vis qui perforait la bibliothèque, jusqu’à l’observatoire, un minuscule cabinet creusé à même les rayons. Arsène Sapristi n’était pas un simple bibliothécaire. Il était la conscience de la ville, son archiviste, son fossoyeur. Il avait mis en scène les funérailles de Sybil Vane une quinzaine de fois avant de comprendre qu’il était lui-même rongé par la lèpre qui envahissait l’œuvre magistrale d’Estèphe Arkadas. Il s’était réfugié dans l’ancienne bibliothèque de la ville, créant dans les livres des îlots de stabilité. C’est ainsi qu’il avait découvert les livres-prisons mais aussi l’existence d’une biographie familiale consacrée aux Arkadas. 

« Impossible ! Un tel livre n’existe pas. Je n’ai jamais trouvé trace d’un document indiquant les origines d’Arkadas, s’insurgea Vicdan. 

- Je connais votre travail et je le respecte. Mais vous ignorez tout d’Estèphe Arkadas. C’est un monstre, un tueur de femmes qui a massacré ses victimes pour pouvoir peindre en toute tranquillité leurs cadavres. Ses tableaux ont poursuivi son œuvre de destruction, rendant fous leurs propriétaires, provoquant le malheur et la ruine… Il n’est pas mort, il se dissimule ici, depuis des années, parmi ses proies qu’il a disposées, comme pour une exposition, derrière les vitres des immeubles du Boulevard J. Ray. Et personne n’a jamais compris ni même vu ses aveux ! » 

Les mains d’Alma Vicdan s’étaient mises à trembler. Il pleurait. Sa vie avait été vouée à rechercher la vérité des artistes et, fasciné par le plus sulfureux d’entre eux, il avait contribué à créer autour de lui une légende frauduleuse, mensongère…  

« Vous n’êtes pas venu ici par hasard… » 

La voix du bibliothécaire se fit nébuleuse lorsqu’il lança : 

« Je vais vous raconter comment est né ce monstre. » 

Arsène Sapristi se leva et disparut au milieu des rayons de sa bibliothèque. 

« Il existe ici trois livres qui expliquent l’origine du monstre. J’ai découvert le premier en enquêtant sur Mic Morven, un primo-romancier disparu comme nombre de ses collègues entre 1970 et 1980, victime de celui que la presse à sensation surnomma « Le tueur du deuxième roman ». Une histoire totalement oubliée de nos jours, n’est-ce pas ? » 

Vicdan n’eut pas le temps de répondre. Sapristi, un livre à la main, poursuivait : 

« Je nous prépare un café. Les voix du jardinier est un récit contemporain assez médiocre bricolé par un nouveau romancier du nom de Stéfio Aman, qui nécessiterait l’ingestion de drogues plus fortes. Mic Morven y a vécu un calvaire… mais il a réussi à s’échapper de cette prison. » 

M. Zalamansky va mourir mais nous ne lui avons rien dit. Le mal qui le ronge est si noir, si total, que nous avons dû sortir de sa chambre plusieurs fois et reprendre nos esprits dans le jardin. L’air est épais, bruissant de cris, d’appels, dont nous percevons les échos étouffés.  Nous sommes vidés en rentrant à la maison. Nous n’avons qu’une envie : dormir. Mais Amédée est là et nous attend. Bien que seuls, nous avons sorti le guéridon et ouvrons la séance. C’est toujours lui qui arrive en premier. Il déborde d’énergie, soulève le guéridon, l’entraîne à l’autre bout de la pièce. Chacune de ses réponses martèle le carrelage. Nous notons tout dans le carnet à spirales. Amédée est bienveillant mais il insiste pour que nous l’aidions. A toutes les séances, il nous demande de porter secours à sa femme et à son enfant qui sont en danger.   Nous nous couchons aussitôt après avoir clos la séance. La liste des clients est longue demain, abattage de gros arbres et élagage.  Quand les premiers ronflements de nous retentissent dans notre chambre, je me glisse sans bruit hors du lit et quitte la pièce à tâtons pour gagner mon bureau où je m’enferme à clef. Déjà deux lettres de menace, comme dans les films, avec les lettres découpées dans les journaux. « Arrête d’écrire Morven », « Pas de 2ème roman »… Mon écriture dérange, fait des envieux. Mon premier roman a été sélectionné pour trois grands prix. Mon ambition est sans limite. Les conversations avec les morts nourrissent mon imaginaire mais les travaux de bûcheronnage m’épuisent. A l’insu de nous, j’ai ouvert un coffre-fort virtuel où je stocke mes archives, notes, brouillons, textes… que j’ai codé avec mon nom inversé 145221815133913. Je découvre les merveilles de l’informatique et réfléchis à tout ce qu’elle permet de créer. […] Mon site Biodesmorts est un succès. Les médiums y postent les informations sur les morts qu’ils ont entendus, les familles s’inscrivent pour avoir des nouvelles de leurs défunts et, à la demande, des biographes interviennent pour offrir un produit fini. J’ai brisé deux des quatre lois : la non-fonctionnalité et l’irréversibilité. Je vais créer une maison d’édition, Les Mots-delà, spécialisée dans la publication d’œuvres dictées par des morts. Mon roman est sur pause. Les menaces ont pris d’autres formes et le jardinier commence à avoir des soupçons. […] M. Zalamansky veut rentrer dans mon bureau. Au début, il se contentait du guéridon puis il a réclamé le ouija ; maintenant, il rampe derrière les murs de notre appartement et cogne toutes les nuits. J’ai accepté de lui parler contre la cloison, de recueillir ses confidences mais Amédée Bersier est jaloux et il est venu aussi. D’autres les ont suivis.  Nuit et jour, je reste l’oreille collée aux murs à guetter leur présence.  Les voix se font de plus en plus assourdissantes. Je sens les ondes vibrer sous mes doigts à travers les murs. Je ne quitte plus mon bureau. Le jardinier me reproche de lui avoir fait perdre notre boulot. Il nous dispute sans cesse. Nous ne trouvons plus le sommeil. Ces voix ! Elles nous rendent fous. De rage, nous entaillons les murs, griffons le papier qui se fend et tombe sur le sol, nous lacérons, déchirons les pages, feuillet après feuillet, taillant un passage dans un grammage plus épais, m’enfonçant dans une noirceur d’encre.   Le calme est revenu. Je dois dormir. La liste des clients est longue demain. » 

Arsène Sapristi referma le livre en soupirant. 

« Excusez-moi. Ce passage me rend toujours triste. Je me demande à quel moment Mic Morven aurait pu échapper à son destin et la réponse est invariablement la même : jamais. Il pensait fuir cet enfer, il a déchaîné un pandémonium.

- Je ne vois pas où vous voulez en venir, Monsieur Sapristi. Vous me faites perdre mon temps… 

- Soyez patient. Le dénouement viendra bien assez tôt. Imaginez ma surprise lorsque j’ai découvert ce livre et ma déception à la page 111… Mic Morven avait disparu. Il s’était ouvert un passage à travers les pages pour fuir cette histoire. Mais où était-il allé ? J’ai continué mes recherches, dévoré des pages et des pages avant de retrouver la trace d’Amédée Bersier dans un opuscule datant de 1871… 

- Je vous laisse avec vos livres. Je dois retourner 68 Boulevard J. Ray et mettre un terme à tout ça. 

- J’y ai pensé moi aussi. Détruire ce monstre… Estèphe Arkadas est le fruit d’un paradoxe, d’une aberration monstrueuse. Histoire de la famille Arkadas ne mentionne aucun Estèphe Arkadas. C’est pourtant entre ses pages qu’il est né. La famille Arkadas vivait dans un château en Touraine et c’est dans les fossés de la demeure familiale que j’ai trouvé un homme traqué et laissé pour mort par les molosses du domaine. Je l’ai caché, soigné et j’ai recueilli ses confidences dans un pavillon en ruine. Il s’appelait Mic Morven. C’était le père putatif d’Estèphe… 

- C’est impossible ! Arkadas est né dans les années 30…  

- Je considère la matière comme dérivant de la conscience. D’autres l’ont dit avant moi et je m’accommode assez bien de cette sentence puisque j’ai accepté, depuis des années, d’habiter la conscience du peintre fou matérialisée dans son dernier tableau, en m’y construisant un petit nid de sagesse… dont l’un des piliers est le café. Vous reprendrez bien de cet excellent Coffea canephora d’Arrakis. Je vais en refaire pour affronter la suite. C’est en mai 1871, en pleine Semaine sanglante, que Mic Morven a retrouvé Amédée Bersier dans un in-octavo publié par E. Dantu, sous la plume d’un certain Eugène André. »   

"Les Versaillais sont dans Paris. Trahison ! Tous aux armes !"

 Des hommes courent partout, baïonnette au fusil, sabre à la main, pistolet à la ceinture, au milieu de civières où s’entassent des blessés et des morts. Je me glisse dans l’ombre d’une maison dont la porte est ouverte. Des femmes passent juste devant moi, elles portent des robes noires avec de grandes écharpes rouges et chantent à tue-tête La Marseillaise. Quelle est cette folie ! Où suis-je ? J’entends des cris, des coups de feu et au loin des canonnades. Je quitte mon abri pour suivre la foule qui fuit.  

" Les Tuileries brûlent ! L’Hôtel-de-Ville brûle ! Vive la Commune ! A bas Versailles ! "

Je commence à comprendre et les scènes de massacre décrites par Amédée Bersier me reviennent en mémoire. Je sais qu’il était sur une barricade rue Lepic et qu’il habitait Montmartre. Je remonte la rue Blanche en longeant les murs. Personne ne fait attention à moi. En passant devant une ruelle aveugle, j’aperçois deux corps affalés contre le mur, au milieu de loques baignant dans une flaque de sang. Un homme et une femme. Je vais détourner le regard quand je vois bouger la vareuse de l’homme. Je m’approche du blessé, prêt à lui porter secours. Sa tête bascule en arrière et le corps retombe dans le caniveau. La femme se redresse, sa bouche est pleine de viande sanguinolente et elle écarte de la main sa jupe déchirée, exhibant un ventre énorme au-dessus de ses cuisses écartées où pend une tête de fœtus. Je m’enfuis en courant au moment où il me semble la voir se relever et tourner la tête vers moi.  A l’approche de la Place Blanche, les rues sont dépavées. Des femmes cousent des sacs de terre qu’elles traînent sur la barricade où une mitrailleuse est déjà installée. Je fais mine de les aider et passe mon chemin en direction de Montmartre. Au détour d’une ruelle, je heurte un homme qui déboule en courant. Il me tend la main, me redresse. C’est un choc ! Je reconnais le visage d’Amédée Bersier, beaucoup plus jeune et plus farouche que sur la photographie que l’histoire a laissée de lui.

"Amédée ! C’est Mic… 

- Mon ami ! "

Il m’a reconnu mais il n’y a pas le temps pour l’étonnement et les questions.         

" Suis-moi, je vais débusquer ce gros cochon de Courbet dans sa bauge. Il crèche dans le Marais, rue Saint-Gilles, chez un dénommé Lecomte… Nous passons prendre Eugène André, la présence d’un garde national à nos côtés ne sera pas superflue. " C’est ainsi que notre petit groupe prend la direction du sud-est parisien pour faire rendre gorge au peintre d’Ornans. En voyant le fédéré, le concierge s’exécute et nous accompagne jusqu’à une porte au troisième étage.  

" M. Courbet, une visite pour vous. " 

N’obtenant pour toute réponse qu’un grognement, Bersier force le passage.  Un gros homme au visage hâve et creusé s’avance vers nous, la barbe rasée, l’air épuisé. 

" Que me voulez-vous ? Je ne suis plus membre de la Commune… 

- Ma femme, où se cache-t-elle ? Judith Thomas, poursuit-il devant l’hébétude du peintre, je sais qu’elle est avec vous !  

- Elle n’est plus là. Elle s’est enfuie ce matin... 

- Que lui avez-vous fait ? 

- Elle est venue d’elle-même. Elle s’est rendue rue Hautefeuille mais des voisins lui ont appris que j’avais quitté mon atelier. Je ne sais pas comment elle m’a trouvé. Elle avait besoin d’argent pour nourrir son enfant. Elle voulait poser pour moi… 

- Vous mentez ! Je lui donne tout ce qu’elle veut… 

- Savez-vous dans quel état est votre femme, monsieur ? Elle est comme une folle. Son rejeton la pousse à faire des choses innommables… Il lui réclame de la viande fraîche, du sang. Elle m’a tout raconté, elle pleurait, elle n’osait plus rentrer chez vous. Et elle m’a montré… J’ai vu cette tête abominable sortir de son sexe, elle bougeait, elle avait des yeux…  

- Dites-moi où elle est allée ! Je dois la retrouver !  

- Je ne sais pas. Je ne sors plus d’ici, ma vie est menacée… Attendez, avant de partir, je dois vous la montrer… Je lui ai donné de l’argent et lui ai conseillé de tout vous dire mais elle a tenu à poser et je les ai peints, tous les deux, sur le modèle du tableau que ce diplomate turc m’a acheté avant la guerre… "

Il disparaît dans un appentis et revient avec un petit tableau.  Amédée s’effondre en larmes. Je le prends dans mes bras. 

" Allons la chercher, lance Eugène André. Si elle est encore en vie… 

- Je sais où elle se cache, une impasse sordide près de la Place blanche. 

- Allons-y ! Et vous, ajoute-t-il en fixant Courbet, détruisez cette abomination ! "

Aristide Sapristi s’interrompit brutalement dans sa lecture. 


«  Comprenez-vous maintenant ? 

- J’avoue que je suis perdu. Cette histoire est horrible mais je ne saisis pas le lien avec Arkadas… A moins que… L’enfant ! C’était lui l’enfant ? 

- Non ! C’était son jumeau. Bersier, André et Morven ont retrouvé Judith saine et sauve et l’ont ramenée au domicile conjugal. Ils l’ont entravée sur le lit. Elle hurlait, vagissait, elle ne resterait pas longtemps attachée. La corde entaillait déjà sa peau. Bersier marchait comme un insensé, pistolet à la main. Mic Morven lui a parlé, il a réussi à le calmer, parce qu’il était venu pour les aider. Il a expliqué que d’où il venait la mère serait soignée après l’avortement et Amédée Bersier a accepté de laisser partir Judith avec Morven. Comment ont-ils atterri dans la propriété des Arkadas ? Ce fut un accident, sans aucun doute. La jeune femme fut recueillie par Mme Arkadas qui fit mander un médecin. Le monstre fut extrait et euthanasié mais il en cachait un deuxième, son jumeau qui sortit par les voies naturelles et survécut. Morven, convaincu de sorcellerie, fut banni et on lâcha les chiens à ses trousses. Il serait mort si je ne l’avais débusqué, après des mois de lecture forcenée. C’est lui qui m’a aidé à mieux reconstituer ses invraisemblables aventures. Quant à Judith et à son fils, Histoire de la famille Arkadas mentionne qu’une jeune femme perdue trouva refuge au château en 1933 et qu’elle n’y resta qu’un an. Je cherche toujours le livre qui raconte cette histoire. Estèphe Arkadas est le seul survivant. 

Je doute d’ailleurs qu’il puisse mourir… Mic Morven s’est installé à Espars où il s’est éteint il y a quelques années. Nous irons voir sa tombe qui est à deux pas d’ici. 

Il ne s’était jamais vraiment remis de la vue du tableau de Courbet que je me plais à intituler L’origine du monstre. »

CE SITE A ÉTÉ CONSTRUIT EN UTILISANT